L’Angélus Millet Jean-François
L'Angélus
D'après " L'Angélus" de Millet
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Que représente vraiment le tableau ? Comment dire beaucoup avec une économie de moyen ?
Originaire des environs de Cherbourg, Jean-François Millet reste aujourd'hui très connu pour ses tableaux avec de grandes figures de paysans. Mais il a commencé sa carrière en abordant tous les genres picturaux, le portrait notamment, dont il s'est fait une spécialité pendant quelques années.
Avec Le Vanneur, présenté au Salon de 1848, il rencontre son premier grand succès dans le « genre paysan ». Dès l'année suivante, Millet s'installe à Barbizon et se consacre aux paysages et aux sujets ruraux.
L'Angélus [ image principale ] lui est commandé vers 1857 par Thomas Gold Appleton, fils d'un riche marchand américain, écrivain et grand amateur d'art. Celui-ci n'en prend pas livraison et le tableau passe dans différentes collections. À la fin des années 1880, alors qu'il est devenu le tableau le plus cher du monde, il est acquis par Alfred Chauchard qui le lègue à l'État en 1909, avec sa collection de peintures.
Du quotidien à l'universel
Au premier plan du tableau, deux paysans, un homme et une femme, sont représentés dans un champ au moment de la prière de l'angélus. En entendant sonner les cloches, ils ont interrompu le travail : la fourche est plantée dans la terre, le panier posé à même le sol [ détail b ]. Ils se recueillent, la tête inclinée, l'homme découvert [ détail c ], la femme les mains jointes [ détail d ].
À l'horizon, le clocher de l'église se découpe sur un ciel coloré de jaunes et de roses [ détail e ]. C'est le soir. La journée s'achève : les sacs dans la brouette sont remplis de pommes de terre. Tout en décrivant une scène de la vie quotidienne, Millet évite l'anecdote. En cela, le contre-jour joue un rôle essentiel, car il laisse les visages dans la pénombre et souligne l'attitude et les gestes [ détail c ] [ détail d ], leur donnant une dimension universelle. Aucun autre élément ne vient distraire l'attention seuls importent la prière et le recueillement. Millet cherche à associer très étroitement le spectateur à la représentation. Il disait : « En regardant cette peinture, j'aimerais que le spectateur entende sonner les cloches. »
Une composition clairement structurée
Millet construit sa composition sur des lignes élémentaires, horizontales et verticales, et sur des rapports de proportion harmonieux, qui définissent ensemble une structure simple et équilibrée. La ligne d'horizon partage le paysage en un tiers de ciel et deux-tiers de terre. Les paysans forment deux verticales qui scandent le tableau.
Le champ est situé dans une plaine qui s'étend à perte de vue. La différence d'échelle entre les paysans au premier plan et l'église à l'horizon donne l'idée de la distance qui les sépare et suggère l'ampleur du paysage. Millet oppose les couleurs claires et lumineuses du ciel et celles terreuses et plus foncées des champs. Dans une palette assez restreinte, les bleus, les jaunes mélangés et les rose-rouge des vêtements sont comme un écho assourdi des couleurs du ciel.
Ce principe de composition parfaitement structurée et ponctuée de couleurs primaires est caractéristique de l'œuvre de Millet. Il se retrouve par exemple dans Les Glaneuses [ image 1 ], tableau qui, comme L'Angélus, présente au premier plan de grandes figures dans un vaste paysage.
Barbizon, réalisme et genre paysan
À partir de 1849, Millet rejoint les peintres installés dans le village de Barbizon, en forêt de Fontainebleau. Ces artistes de Barbizon possèdent comme point commun de privilégier le paysage, alors considéré comme un genre mineur, mais qu'ils aiment représenter pour lui-même, sans y insérer le moindre sujet historique. Ils partagent aussi une même manière de procéder : ils vont dans la forêt ou dans la plaine voisine de Chailly pour faire systématiquement des études peintes sur le motif. C'est à partir de ces études qu'ils peignent leur tableau dans l'atelier. Les peintres de Barbizon font partie du réalisme, courant artistique qui se développe au milieu du XIXe siècle. Avant de devenir impressionnistes, Monet, Renoir, Bazille, Sisley, suivront leur exemple.
Avec des tableaux comme L'Angélus, Les Glaneuses [ image 1 ] ou La Grande Bergère [ image 2 ], Millet contribue à remettre à l'honneur le monde paysan. Sa vision sobre, simple et silencieuse s'inscrit dans une tradition qui s'enracine en France au XVIIe siècle avec les œuvres de Le Nain [ image 3 ].
Un tableau populaire
Depuis son entrée dans les collections publiques, la popularité de L'Angélus n'a cessé de croître. Le tableau est une source d'inspiration dans les domaines les plus variés : de la peinture avec Salvator Dalì au cinéma, en passant par l'illustration et la décoration [ image 4 ]. Ce tableau, l'un des plus connus au monde, est devenu une icône au risque de désacraliser l'œuvre.
Pour en savoir plus sur l'évolution de l'image du paysan, rendez-vous sur le site L'Histoire par l'image.
Mots-clés
Ressources
Les paysans entrent dans l’histoire
http://www.histoire-image.org/site/oeuvre/analyse.php?i=292&d=1&m=millet
Pour la jeunesse, une introduction au réalisme
Un dossier sur le réalisme
http://www.musee-orsay.fr/fr/collections/dossier-courbet/le-realisme.html
Une découverte de la peinture de paysage
Une exposition sur la forêt de Fontainebleau, lieu de vie et source d’inspiration, avec ses environs, pour Millet et les peintres de Barbizon
Une synthèse sur la représentation des paysans
http://www.histoire-image.org/site/etude_comp/etude_comp_detail.php?i=589&d=1&m=millet
Glossaire
Angélus : Dans la religion catholique, l’angélus est une prière qui se récite le matin, le midi et le soir. Elle rappelle la salutation de l'ange Gabriel à la Vierge Marie, lors de l'Annonciation.
Palette : La palette est la petite planche sur laquelle l’artiste dispose et mélange ses couleurs. Le terme désigne aussi l’ensemble des couleurs qu’il choisit pour une œuvre.
Peindre sur le motif : Expression qui signifie peindre en ayant sous les yeux ce que l’on souhaite représenter.
Réalisme : Courant artistique du XIXe siècle qui privilégie une représentation non idéalisée de sujets inspirés du monde réel. Le peintre Gustave Courbet en est la figure de proue, et son tableau Un enterrement à Ornans, exposé en 1855, le premier manifeste.