La Nef du Grand-Palais Deglane Henri

La Nef du Grand Palais image principale n’est qu’une partie du monument, mais elle en fait la renommée depuis 1900. D’abord admirée, elle est ensuite oubliée au profit des événements qui s’y tiennent ; elle a failli s’effondrer avant de renaître grâce à de nouvelles prouesses techniques. Ses liens organiques avec l’ensemble du monument sont aujourd’hui enfin rétablis.

Une verrière unique en Europe

La Nef image principale détail b est l’espace le plus spectaculaire du Grand Palais, avec 13 500 mètres carrés. Sa construction a nécessité 6 000 tonnes d’acier et sa hauteur au niveau de la coupole culmine à 45 mètres. C’est, en 1900, le hall le plus spacieux de France, et aujourd’hui encore la surface vitrée la plus importante en Europe détail c.

Le Grand Palais a été construit pour accueillir des événements de premier plan, dont le Concours hippique de Paris image 1. Ses dimensions sont celles d’une piste permettant les évolutions en dressage, les épreuves de saut et les tableaux du carrousel, une parade équestre. La hauteur et l’ampleur de la verrière en découlent. Le choix d’une verrière tient au refus de son concepteur, Henri Deglane, d’un éclairage électrique : le monument doit héberger des œuvres d’art, et l’on se méfie encore des courts-circuits. Ensuite, l’architecture des serres est à la mode, particulièrement depuis l’Exposition universelle de 1851 à Londres et son splendide Crystal Palace, avec lequel l’architecte veut rivaliser : la France doit éblouir le monde pour l’édition de 1900 à Paris image 2. La verrière du Grand Palais défie le monument londonien avec sa dimension exceptionnelle de 17 500 mètres carrés image 3 détail b.

Dès 1901, l’édifice accueille tous les événements artistiques, techniques ou économiques qui font le renom de la nation. C’est à chaque fois une surenchère de mises en scène et de décors mémorables. Pourtant, un événement faillit coûter la disparition de cet important monument situé au cœur Paris, entre les Invalides et les Champs-Élysées : pendant la semaine de la libération de Paris (19-25 août 1944), l’envoi par l’ennemi d’une charge explosive dans la Nef provoqua un incendie qui détruisit une grande partie de l’aile nord.

Spectaculaire, mais fragile

Le public découvre la Nef en 1900, un espace inondé par la lumière du ciel parisien image 4. La presse ayant longuement décrit les étapes de sa construction, personne n’ignore l’ampleur des techniques modernes mises en œuvre, dont des grues et scies fonctionnant à l’électricité image 5. Les articles avaient même eu le ton de l’épopée pour raconter les difficultés vaincues au début du chantier : le sol côté Seine s’étant révélé plus spongieux que prévu, 3 400 pieux de chêne de 10 mètres de long avaient dû y être enfoncés, pendant six mois, pour le consolider. Les critiques viennent plus tard, lorsque l’espace se comporte comme une serre image principale, étouffant en été, glacial en hiver. De même, la pollution opacifie le vitrage, et des désordres apparaissent dans l’architecture. Dès les années 1920, l’assise du monument n’est plus stable image 6. Divers travaux sur les berges de Seine ont modifié l’immersion des pilotis et sapé leur conservation. Avant la Seconde Guerre mondiale, du béton est coulé dans le sol côté sud, mais le déséquilibre de la charpente s’accentue inexorablement, jusqu’à provoquer la cassure de rivets dans la structure métallique en 1993. La Nef est alors fermée au public ; elle ne rouvre que douze ans plus tard, en 2005.

Le Grand Palais sauvé

La Nef renaît à l’occasion de deux chantiers. Le premier, en 2000-2005, la sauve de l’effondrement. Son assise est stabilisée par des injections de béton dans le sol qui isolent les fondations de la nappe phréatique. Dans les parties hautes, les plaques de verre sont retirées ; allégé, le squelette en acier est soulevé de quelques centimètres par un monumental échafaudage sur vérins, pour que les parties corrodées soient remplacées. 20 000 rivets, sur les 1,8 million que compte l’édifice, sont changés. Une fois l’échaudage retiré progressivement et l’équilibre des forces rétabli, un vitrage en verre armé plus léger et transparent remplace l’ancien.

Les structures sont repeintes en « Vert réséda pâle », couleur qui, en 1900, avait fait le succès du fabricant Ripolin détail d. Redécouverte par le public, la Nef est à nouveau un lieu de rencontres, d’événements et de fêtes.

Le nouveau Grand Palais

Pour autant, elle ne retrouve sa véritable identité que 125 ans après sa création, avec le chantier de restauration et de modernisation du Grand Palais 2021-2025. La réhabilitation intérieure s’imposait, après des décennies d’occupations diverses ; les ajouts de cloisons et des modifications d’axes de circulation avaient dénaturé le plan et les décors d’origine. Aujourd’hui, la circulation entre la Nef et le reste de l’édifice est rétablie ; la lumière de la verrière éclaire à nouveau les espaces autour d’elle ; les visiteurs peuvent profiter de points de vue inattendus depuis les promenoirs des balcons détail e détail f; l’escalier d’honneur a retrouvé sa majesté détail g, il est utilisé notamment pour l’entrée en piste des athlètes des Jeux olympiques de l’été 2024.

Désormais, comme en 1900, le monument entier se montre autant qu’il donne à découvrir.

Le chantier du Grand Palais - Dalle de la Nef : 18 mois de travaux en une minute !, une vidéo du GrandPalaisRmn, 1mn30.