Vierge en Majesté

Vierge en Majesté

Auteur

Dimensions

H. : 84 cm ; L. : 27 cm ; Pr. : 36 cm

Provenance

Lieu de création : Auvergne (France)

Technique

Sculpture, Polychromie

Matériaux

Noyer (bois)

Datation

Vers 1150

Lieu de conservation

France, Paris, musée du Louvre

Pourquoi les personnages présentent-ils une attitude figée ?

Parfaitement frontale, cette sculpture image principale présente Marie retenant Jésus de sa main droite et le maintenant au niveau du genou gauche. L’Enfant bénit et tenait vraisemblablement un livre. Ils sont assis sur un trône à colonnettes agrémenté d’un coussin image b. Il s’agit d’un type particulier de sculpture religieuse à l’époque romane. Cette œuvre servait à la dévotion et avait une autre fonction.

Une œuvre en bois autrefois peinte

Peu de sculptures autonomes en bois du Moyen-Âge ont été préservées. Celle-ci a été réalisée dans une bille de noyer. Les têtes et la plupart des colonnettes du trône ont été sculptées dans des blocs complémentaires image d. Lors de l’exécution, le bois a commencé à se fendre et le sculpteur a utilisé des agrafes de métal, visibles sur le socle et sur la tête de Marie, pour renforcer l’ensemble image d. Comme la plupart des statues médiévales, cette sculpture était complètement peinte image principale. La Vierge porte une longue robe verte à motif de losanges noirs et un manteau bleu couvrant sa tête. L’Enfant, vêtu d’une robe jaune, est enveloppé dans un manteau rouge. Les visages ont été repeints plusieurs fois, mais les vêtements ont été rapidement masqués par un revêtement métallique destiné à rendre la statue plus impressionnante image 1. Ce revêtement, constitué d’un alliage de cuivre et d’argent, a été arraché plus tard. Les clous qui le maintenaient sont encore visibles. La tête de Jésus, un peu trop petite et dissymétrique image c, date du XIIIe siècle et provient peut-être d’une autre statue.

Les statues en majesté

La représentation du Christ, de la Vierge ou d’un saint à mi-corps ou assis sur un trône est appelée traditionnellement « majesté ». Ce thème a eu beaucoup de succès du Xe au XIIe siècle. Il dérive des représentations de la Vierge assise devant les rois mages qui existaient dès le IVe siècle image 2 et se rencontre dans les manuscrits image 3 et jusque sur les premiers portails ou retables gothiques image 4. Plus tard, le terme sedes sapientiae (« trône de sagesse ») désigne aussi ce type de sculpture où la Vierge devient une incarnation du trône du Christ.

Une statue romane d’Auvergne

La statue était vouée à la dévotion dans une église ou une chapelle. Elle pouvait aussi être utilisée à certains moments de l’année pour des processions. Une ouverture visible dans le buste de Marie image ecommunique avec la cavité où s’encastre le bas de la tête image d. Une relique devait y être placée. L’ouverture était masquée par le revêtement ou un cristal de roche, ou bien a été pratiquée plus tardivement pour récupérer les reliques image e.

La plupart des Vierges en majesté romanes proviennent du Massif central. L’isolement géographique de cette région leur a permis d’échapper plus facilement aux vicissitudes de l’histoire (notamment aux destructions pendant la Révolution française) et à l’évolution des styles. Le Louvre a acheté cette statue en 1894 comme venant du Forez, à l’ouest de Clermont-Ferrand image 7. La comparaison avec des œuvres à la provenance assurée permet d’accepter cette origine auvergnate, sans pouvoir être plus précis image 5.

L’aspect hiératique, c’est-à-dire frontal et majestueux, le jeu des plis du drapé, parallèles et souples, ainsi que les disproportions de la main de Marie ou du corps trop adulte de Jésus s’inscrivent dans l’art roman. L’élégance de l’ensemble et l’allongement des silhouettes laissent penser qu’elle date du milieu du XIIe siècle, car les sculptures de la Vierge en majesté de la seconde partie du siècle affectent des formes plus lourdes. Leur attitude raide et les visages impassibles sont typiques des statues de la Vierge et l’Enfant de cette époque. Il ne s’agit pas de créer une représentation réaliste, mais d’impressionner le fidèle en donnant le sentiment du sacré image principale.

La dévotion pour la Vierge grandira aux XIIIe et XIVe siècles. Les images frontales et impassibles du XIIe, qui montrent un nouvel intérêt pour le rendu des volumes, évolueront vers des figures plus naturalistes et plus humaines de mère et enfant image 6.

Nathalie Gathelier

Permalien : https://panoramadelart.com/analyse/vierge-en-majeste-0

Publié le 05/12/2022

Glossaire

Art roman : Art qui se développe dans l’Occident chrétien à partir du Xe siècle. Vers le milieu du XIIe siècle, l’art gothique le remplace progressivement au nord de la Loire.

Reliquaire : Boîte destinée à contenir une ou plusieurs reliques. Réalisée dans des matériaux divers, elle a une forme plus ou moins élaborée.

Majesté : Se dit des statues du Christ, de la Vierge ou de saints représentés à mi-corps ou assis sur un trône.