Boudoir d’Argent de la reine Marie-Antoinette au château de Fontainebleau Rousseau Pierre

Boudoir d’Argent de la reine Marie-Antoinette au château de Fontainebleau

Dimensions

H. : 295 cm ; L. : 420 cm

Provenance

Technique

Architecture

Matériaux

Datation

1785-1786

Lieu de conservation

France, Fontainebleau, château de Fontainebleau

Vie de cour ou vie privée ? La passion de la reine Marie-Antoinette pour les petites pièces luxueusement ornées.

La vie de cour est avant tout une vie publique soumis au regard d'autrui, l'individu doit se contrôler en permanence. Sous le règne de Louis XVI, ce cérémonial de cour est de plus en plus perçu comme une contrainte. La reine Marie-Antoinette s'y soumet, mais multiplie les échappatoires.

À Fontainebleau, elle fait aménager deux cabinets de retraite donnant sur le jardin de Diane : le Boudoir turc image 1, réalisé en 1777, et le boudoir d'Argent image principale, entre 1785 et 1786. Dans ces lieux de vie privés, la reine se repose, écrit, lit et reçoit quelques intimes.

Le boudoir de la Reine

Situé au premier étage, entre la chambre d'apparat du Roi et celle de la Reine, le boudoir d'Argent est une petite pièce de forme rectangulaire à deux pans coupés sur une longueur et éclairée sur l'autre par deux fenêtres.

Quatre portes en permettent l'accès. L'une d'elles mène à un couloir qui conduit au cabinet de la chaise de la Reine, une pièce destinée à l'utilisation d'une chaise percée. Un escalier permet de monter au Boudoir turc et de descendre dans l'appartement des Enfants de France.

Pierre Rousseau en conçoit l'ornementation. Il choisit de privilégier la peinture aux dépens de la sculpture, quasiment absente du décor. La première est présente dans les moindres détails : sur les boiseries, les portes, le plafond. La seconde, en revanche, n'est utilisée que pour souligner le rythme du décor : encadrement des panneaux avec le motif du ruban perlé, encadrement des miroirs.

Le goût pompéien

Le style décoratif du boudoir traduit le changement de goût qui s'opère dans le troisième quart du XVIIIe siècle en Europe. Avec les fouilles engagées à Pompéi à partir de 1748, le goût pour l'Antiquité gréco-romaine gagne tous les domaines de l'art.

Le rocaille, avec ses lignes courbes, laisse la place au « bon goût des Anciens ». Les peintres couvrent les lambris d'un décor qui fait référence à l'Antiquité image b image c, reprenant les motifs des camées, peignant des bas-reliefs en trompe-l'œil avec un camaïeu de bleu rehaussé de touches de blanc, recourant au répertoire iconographique de certaines fresques antiques (femmes drapées, sphinges canéphores dont les queues se terminent en rinceaux de feuilles d'acanthe).

L'Antiquité fleurie

Chez Marie-Antoinette, ce goût pour l'Antiquité se double d'un attrait très particulier pour la nature.

En 1774, juste après son avènement, Louis XVI avait donné à son épouse la clé du Petit Trianon, à Versailles. La reine avait transformé le lieu et fait réaliser des jardins à l'anglaise, plus naturels, plus sauvages que les jardins à la française.

Dans le boudoir d'Argent, cette passion pour la nature s'exprime par la profusion de motifs floraux sur les meubles, notamment la garniture des sièges. Le naturalisme des fleurs est poussé à l'extrême : bleuets, marguerites, roses, blé et lierre sont aisément identifiables image b image c image d.

La grande particularité du boudoir est d'offrir une profusion florale intimement mêlée à des motifs relevant d'une inspiration antique. Cette relecture de l'Antiquité et l'émergence de ces motifs floraux naturalistes caractérisent presque tous les décors royaux du règne de Marie-Antoinette, au point qu'on a pu parler d'un style « antique fleuri ».

Une harmonie unique

Le décor du boudoir se caractérise par une harmonie nacrée. Sur les fonds des panneaux muraux, elle est obtenue par l'application de feuilles d'or blanc. Le boudoir sert d'écrin à un secrétaire à cylindre et à une table à ouvrage, réalisés par l'ébéniste Jean-Henri Riesener, qui possèdent tous deux un décor losangé et nacré dont la tonalité argentée rappelle les lambris. Cette recherche constante de l'harmonie de la couleur est également présente dans les sièges en bois doré et argenté de l'ébéniste Georges Jacob.

Par ailleurs, il existe une grande unité dans les motifs décoratifs choisis. Ainsi, le ruban perlé de l'encadrement des boiseries se retrouve sur la ceinture des sièges le motif du carquois garni de flèches est présent sur les piédroits de la cheminée, les pieds des sièges et ceux du bureau à cylindre la guirlande de lierre sculptée qui orne la cheminée grimpe également le long des fenêtres image e et se poursuit sur le dossier des sièges.

En 1796, le mobilier du château de Fontainebleau est dispersé. Le secrétaire est acheté par Alfred Rothschild en 1882, puis reste en Angleterre jusqu'à son acquisition au XIXe siècle par Edulji F. Dinshaw pour sa résidence de New York. Le fonds de sauvegarde de Versailles s'en porte acquéreur en 1956, puis le secrétaire est envoyé au château de Fontainebleau en 1961. Quant à la table en auge, elle réapparaît lors de la vente Coty à Paris en 1937, puis réunie au secrétaire par Edulji F. Dinshaw. Donnée au Louvre, elle est envoyée à Fontainebleau le même jour que le bureau à cylindre. Ce fait a son importance, car le boudoir est conçu comme un tout. Raffinement et harmonie sont les maîtres mots de ce petit bijou féminin.

Ressources

Une analyse historique du tableau d’Élisabeth Vigée Le Brun représentant la reine Marie-Antoinette et ses enfants sur le site L’Histoire par l’image

https://histoire-image.org/fr/etudes/marie-antoinette-restaure-son-image

Une présentation du domaine de Trianon sur le site du château de Versailles

https://www.chateauversailles.fr/decouvrir/domaine/domaine-trianon

Une présentation du hameau de la Reine sur le site du château de Versailles

https://www.chateauversailles.fr/decouvrir/domaine/domaine-trianon/hameau-reine

Glossaire

Sphinge : (ou sphinx) Figure de la mythologie grecque, représentée comme une femme ailée à corps de lionne. À Thèbes, le héros Œdipe fut le seul à résoudre l’énigme qu’elle posait aux passants et elle se tua. Elle est liée au monde des morts et considérée comme une gardienne de la tombe.

Rocaille : Mouvement artistique du XVIIIe siècle qui s’épanouit en France, à partir de la Régence, dans les ornements architecturaux et les arts décoratifs en privilégiant les jeux de courbes. En peinture, les artistes illustrent des sujets légers et séduisants, galants ou exotiques, dans un traitement où l'aspect décoratif voire anecdotique l’emporte.   

Camaïeu : Technique de peinture qui consiste à n’utiliser qu’une seule couleur et ses différentes tonalités.

Canéphore : Dans la Grèce antique, jeune fille qui portait sur la tête les corbeilles sacrées contenant les offrandes et les instruments du sacrifice durant des rituels religieux.