La Liberté éclairant le monde Bartholdi Auguste
La Liberté éclairant le monde
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Saviez-vous que cette statue emblématique de la ville de New York, et des États-Unis en général, était l’œuvre d’un sculpteur français ?
Auguste Bartholdi naît en 1834 à Colmar, en Alsace, dans un milieu aisé. Il perd son père à l'âge de 2 ans sa mère décide alors de s'installer à Paris, tout en gardant de profondes attaches à Colmar.
Lycéen, Bartholdi fréquente l'atelier du peintre Ary Scheffer, qui lui conseille de s'orienter vers une carrière de sculpteur. À 20 ans à peine, il remporte un concours organisé par la ville de Colmar et réalise sa première œuvre monumentale, une statue en bronze à l'effigie du général Rapp image 1, inaugurée en 1856. Avec le peintre Jean-Léon Gérôme, son ami, il entreprend alors un voyage vers l'Égypte et le Yémen, dont il rapporte de nombreux souvenirs. À son retour, il participe à de nombreux concours pour des commandes publiques.
Un cadeau d'amitié pour l'Amérique
En 1865, alors que Bartholdi participe à un dîner chez Édouard de Laboulaye, un juriste américanophile, l'idée germe parmi les convives de sceller l'amitié franco-américaine par le don d'une sculpture monumentale qui commémorerait le centième anniversaire de la déclaration d'indépendance des États-Unis (4 juillet 1776), à l'issue d'une guerre à laquelle la France avait participé.
Bartholdi, réputé pour ses projets architecturaux et ses effigies d'hommes célèbres, est choisi pour la réaliser.
Une thématique chère à Bartholdi
Le projet est lancé, mais il faut attendre 1871 pour que le sculpteur se rende à New York et conçoive La Liberté éclairant le monde.
Entre-temps a effectivement éclaté la guerre franco-prussienne de 1870, dans laquelle Bartholdi s'est engagé comme aide de camp de Garibaldi il est très affecté par la défaite de la France, d'autant plus que son Alsace natale est annexée par la Prusse. Le symbole de la liberté revêt alors pour lui une signification toute particulière.
Parallèlement à la conception de la Statue de la liberté, Bartholdi est choisi pour exécuter une statue hommage à la résistance héroïque de la ville de Belfort aux assauts prussiens : le Lion de Belfort image 2.
En 1875, une souscription appelant à la réalisation de la statue est enfin lancée. Le projet est ainsi décrit : « Il s'agit d'élever, en souvenir du glorieux anniversaire, un monument exceptionnel. Au milieu de la rade de New York, sur un îlot qui appartient à l'Union des États, en face de Long Island, où fut versé le premier sang pour l'indépendance, se dresserait une statue colossale, se dessinant sur l'espace, encadrée à l'horizon par les grandes cités américaines de New York, Jersey City et Brooklyn. Au seuil de ce vaste continent, plein d'une vie nouvelle, où arrivent tous les navires de l'univers, elle surgira du sein des flots elle représentera : “La Liberté éclairant le monde.” La nuit, une auréole lumineuse, partant de son front, rayonnera au loin sur la mer immense. »
Une iconographie et un style monumental inspirés de l'Antiquité
Si les premières études de Bartholdi montrent une Liberté de style orientaliste, celle-ci est finalement devenue une femme fièrement drapée à l'antique, coiffée d'un diadème à sept pointes image principale. Elle semble s'avancer, libérée de ses chaînes qui gisent à ses pieds image d. De sa main droite, elle brandit haut la torche enflammée image b, tandis que de la gauche, elle tient solidement contre elle une tablette symbolisant la loi image c. Cette iconographie sévère se distingue de celle qu'avait choisie Eugène Delacroix dans son tableau manifeste La Liberté guidant le peuple image 10 plus de quatre décennies auparavant.
La monumentalité est au cœur du projet. Elle s'inscrit non seulement dans le sillage du style monumental à la mode au Second Empire, mais également de la statuaire antique grecque et égyptienne. Bartholdi se souvient en effet des colosses de Memnon image 3 qu'il a pu observer lors de son voyage en Égypte. Sa statue évoque aussi le mythique colosse de Rhodes de l'Antiquité grecque.
Une prouesse technique : de la conception à la réalisation
La recherche de monumentalité amène Bartholdi à renoncer à une statue de bronze coulé, dont le poids serait beaucoup trop important pour le piédestal. Il privilégie donc l'usage d'une charpente métallique en fer couverte de plaques de cuivre.
Tour à tour, Eugène Viollet-le-Duc puis Gustave Eiffel collaborent aux études de la structure, conçue dans les ateliers de ce dernier à Levallois-Perret les plaques de cuivre, elles, ont été montées dans les ateliers Gaget, Gauthier et Cie, rue de Chazelles image 6 image 7, dans le 17e arrondissement de Paris.
Au final, cinq grandes étapes sont nécessaires à la réalisation de la Statue de la Liberté. Tout d'abord, Bartholdi façonne un premier modèle en plâtre de 2,11 m de haut (sans le bras levé), puis un second, également en plâtre, quatre fois plus grand que le précédent (soit au quart de la taille de la sculpture définitive). Ensuite, par une projection de mise au carreau, c
e second modèle permet de fabriquer, un à un, les éléments de la sculpture aux dimensions réelles. Enfin, les feuilles de cuivre sont mises en forme par emboutissage puis assemblées par rivets.
Afin de renseigner le public américain sur l'évolution des travaux en cours et éveiller son enthousiasme, Bartholdi décide de présenter à Philadelphie, lors de l'Exposition universelle de 1876, la main droite grandeur nature image 4. Deux ans plus tard, c'est la tête image 5 que le sculpteur montre à l'Exposition universelle de 1878, à Paris.
Il faudra encore cinq années de travail pour terminer la sculpture, qui étonne et fascine par la prouesse technique accomplie.
Bien que le délai n'ait pu être tenu et l'ensemble du projet mené à temps pour la date anniversaire, c'est au final une œuvre gigantesque de 56 m de hauteur et pesant 120 t de fer et 80 de cuivre qui est livrée aux États-Unis, autant fonctionnelle que symbolique.
Un symbole de paix et de liberté
Le 4 juillet 1884, Ferdinand de Lesseps, nouveau président de l'Union franco-américaine, signe l'acte de donation de la sculpture au peuple américain. Quant au financement du socle, il est assuré par les Américains eux-mêmes.
Les différents éléments de l'œuvre, répartis dans 210 caisses, sont livrés en juin 1885 puis assemblés image 8. La sculpture est inaugurée le 28 octobre 1886 mesurant avec son socle 91 m de haut image principale, elle est à cette époque la statue la plus haute du monde.
D'emblée mondialement connue, la statue se dresse à l'embouchure de l'Hudson, là où des générations d'immigrés arrivent d'Europe image 9. Progressivement, elle devient la Statue de la Liberté, se muant en symbole de l'espoir qui les anime à leur arrivée dans le Nouveau Monde. En 1903, les derniers vers d'un poème de l'Américaine Emma Lazarus, intitulé The New Colossus (« le nouveau colosse »), sont d'ailleurs gravés sur le socle, faisant parler la statue : « Envoie-les moi », dit-elle au Vieux Monde à propos des « pauvres » et des « exténués » qui « en rangs pressés aspirent à vivre libres ».
Le rêve américain, image d'actualité
Ce symbole de paix intègre très vite l'histoire des États-Unis. Dès lors qu'il s'agit de s'adresser au peuple américain, de le rassembler, de le faire adhérer, l'image de la statue créée par Bartholdi est utilisée. Les affiches s'en emparent image 11, ainsi que les bons établis lors du premier conflit mondial pour les emprunts de guerre.
La Statue de la Liberté fédère. Au-delà de sa fonction commémorative, elle est une promesse pour l'avenir, un symbole du rêve américain. Elle devient une marque de l'Amérique, tour à tour plébiscitée, idéalisée, caricaturée. Le publiciste l'utilise. L'artiste également. Elle est aussi largement exploitée par le cinéma, puis par les séries qui contribuent largement à la pérennité de sa célébrité.
À Paris, deux répliques témoignent des origines françaises de ce projet exceptionnel. Offerte par des Français vivant aux États-Unis, une statue de 11 m de haut est inaugurée en 1889 à la pointe ouest de l'île aux Cygnes, à Paris image 12. Une autre version réduite est érigée dans les jardins du Luxembourg en 1900, puis transférée quelques années plus tard au musée d'Orsay image 13. Des deux côtés de l'Atlantique, la Statue de la Liberté conserve un pouvoir symbolique qui demeure totalement d'actualité et rayonne de manière universelle.
Bartholdi, la passion d'une ville, une promenade dans Colmar, une vidéo de Colmar/TV
Mots-clés
Véronique Duprat-Roumier
Permalien : https://panoramadelart.com/analyse/la-liberte-eclairant-le-monde
Publié le 20/07/2021
Ressources
Des ressources iconographiques sur le site de la bibliothèque du Congrès
https://www.loc.gov/search/?in=&q=statues+of+liberty&new=true&st=
La notice de la réplique conservée au musée d’Orsay
https://www.musee-orsay.fr/index.php?id=851&L=0&tx_commentaire_pi1[showUid]=23150&no_cache=1
Le site du musée Bartholdi à Colmar
Une émission de France Culture sur la Statue de la Liberté
Glossaire
Emboutissage : Procédé métallurgique à froid qui consiste à frapper une plaque de métal sur un support solide de manière à lui donner une forme. Allégorie, Exposition universelle
Mise au carreau : Technique de dessin qui consiste à réaliser un quadrillage sur un modèle de façon à permettre son agrandissement en respectant ses proportions.