Whistlejacket Stubbs George
Whistlejacket
dit Le Derby de 1821 à Epsom
Auteur
Dimensions
Provenance
Technique
Matériaux
Datation
Lieu de conservation
Pourquoi faire le portrait d’un cheval comme on ferait celui d’un homme important ?
Cette œuvre image principale est une commande de Charles Watson-Wentworth, marquis de Rockingham image 1. C’est un homme d’État britannique du parti whig, parti apparu en Angleterre à la fin du XVIIe siècle et qui militait en faveur d’un Parlement fort, en s’opposant à l’absolutisme royal. Propriétaire d’un célèbre haras de plus de deux cents chevaux, il commande à George Stubbs image 2 une série de portraits, dont celui de Whistlejacket, un cheval pur-sang.
Un portrait pour un cheval d’exception
George Stubbs donne à ce portrait une prestance singulière par les dimensions exceptionnelles du tableau et traduit la puissance physique du cheval, qui en occupe tout l’espace. Le fond neutre à la tonalité mordorée met en valeur l’animal. Rien ne distrait le regard, car il n’y a ni paysage ni personnage.
Le pelage du cheval est constitué de poils allant du roux au brun, plus ou moins foncés. On appelle cette couleur de robe alezan. Sa crinière et sa queue sont de tons blonds plus clairs que la robe. La lumière joue sur le corps de l’animal, mettant en valeur sa croupe prodigieuse de force et d’élégance. Sa tête est tournée vers le spectateur, qu’il fixe d’un regard vif détail b. Deux marques blanches particulières, sur le front et sur l’un des quatre membres, permettent d’identifier ce cheval. Il s’élève par une levade, c’est-à-dire qu’il se tient debout sur ses membres postérieurs. Veines et muscles fléchisseurs frémissent sous la peau. Présenté sans tapis de selle ni bride, il apparaît sauvage et noble en même temps. Whistlejacket est un étalon alezan né en 1749 au haras de Sir William Middleton, dans le Northumberland. Il descend de Godolphin Arabian image 3, l’un des tout premiers étalons arabes importés en Angleterre au début du XVIIIe siècle. Sir William Middleton est un homme politique et propriétaire terrien, mais ruiné : à sa mort, ses biens sont vendus aux enchères pour rembourser ses dettes. Son haras est dispersé et l’un de ses plus beaux chevaux, Whistlejacket, est acheté par Charles Watson-Wentworth. Il fait la fierté de son nouveau propriétaire, d’où la commande de l’œuvre à George Stubbs.
Une étude d’anatomie
George Stubbs est surnommé le peintre des chevaux. En 1756, il loue une ferme dans le village de Horkstow, dans le Lincolnshire, où il dissèque des chevaux pour mieux comprendre leur anatomie, dont il acquiert une connaissance parfaite. Il déménage ensuite à Londres. Ses notes et ses dessins sont publiés en 1766 dans L’Anatomie du cheval, ouvrage composé d’une série de planches. L’animal y est représenté de trois quarts, de face et de dos ; les os, les muscles et ligaments y sont détaillés. Les dessins originaux sont conservés à la Royal Academy of Arts, à Londres.
George Stubbs réalise l’ouvrage dans sa totalité. Il dessine, grave les planches image 4, écrit les commentaires et publie même le livre à ses frais. Ce travail très minutieux explique les huit années nécessaires à son achèvement. Dans sa préface, Stubbs adresse son recueil en premier lieu aux artistes, puis aux vétérinaires, aux maréchaux-ferrants et à tous ceux qui élèvent des chevaux.
En peignant ces animaux et leur entourage, il a peint une société, une époque. Il a contribué à l'essor d'un genre que les Anglais ont désigné sous le nom de sporting art.
Le sporting art, un genre en peinture
Ce genre artistique est né en Angleterre avec le développement des sports équestres de loisir.
L’aristocratie anglaise image 5 réside à la campagne. Elle chasse, organise des courses de chevaux. En 1750, la création du Jockey Club transforme un divertissement en une institution nationale, qui lentement se démocratise pour devenir la grande fête populaire du Derby d’Epsom image 6. Ce nouvel art de vivre suscite la commande de tableaux : d’abord des portraits d’aristocrates à la chasse avec leur équipage, puis l’intérêt se concentre sur le portrait du cheval favori. Ce genre acquiert ses lettres de noblesse avec George Stubbs.
La famille conserve le tableau jusqu’en 1997, date à laquelle les fonds du Heritage Lottery Fund ont permis à la National Gallery de l’acquérir pour onze millions de livres.
Ressources
Un article sur l’exposition « Vies de cheval. Du fond de la mine aux Jeux équestres » aux Archives nationales (25 août – 25 octobre 2014)
Un article sur l’exposition « Peindre les courses : Stubbs, Géricault, Degas » au domaine de Chantilly (16 juin – 14 octobre 2018)